Le bateau autonome : le nouveau moyen de transport

En France, le nautisme est un secteur d’activités très apprécié. Nous comptons notamment 13 millions de plaisanciers, sur tous types d’embarcation, du jet-ski au bateau, et ce chiffre ne cesse d’augmenter. La révolution technologique transforme le marché de l’automobile avec le développement de véhicules autonomes fonctionnant grâce à l’électricité. Après les voitures, c’est au tour des avions et des bateaux de s’autonomiser. Le transport maritime autonome est aujourd’hui une technologie en pleine expansion qui pourrait révolutionner le secteur maritime civil et militaire. Découvrez tous les projets concernant le bateau autonome.

Le bateau autonome : l’avenir du nautisme et de la plaisance ?

La technologie et l’autonomie des moyens de transports

Si les moyens de transports terrestres deviennent autonomes, ce ne sont pas les seuls. Pendant que les constructeurs automobiles du monde entier s’attellent au développement de véhicules autonomes pour envahir les routes, la conduite autonome inspire déjà des projets aéronautiques et navals.

D’ici 2020, les bateaux devraient circuler sans équipage et être pilotés à distance. Entre remorqueurs, vraquiers, porte-conteneurs et ferrys, le transport maritime prend la vague des bateaux robots et les projets fourmillent, ce qui n’est pas du goût de tous les marins.

Le concept du bateau autonome

le concept du bateau autonome Le bateau autonome, également appelé bateau volant, est équipé de foils (ailerons) qui lui permettent de décoller légèrement de la surface de l’eau et d’ainsi gagner en vitesse.

Le prototype du bateau autonome a été créé par le Massachussetts Institue of Technology (MIT) dans le cadre du projet Roboat lancé en 2016 avec l’AMS, un centre de recherche d’Amsterdam dédié aux questions urbaines. Ce prototype montre un bateau avec une coque rectangulaire de 4 mètres sur 2, 16 éléments créés par impression 3D et joints par plusieurs couches de fibre de verre.

L’objectif est de désengorger les rues des villes striées par les canaux et rivières telles que Venise, Amsterdam ou Bangkok. Ces bateaux serviraient pour toute sorte d’activités telles que le transport majoritairement, mais aussi les livraisons et le ramassage des ordures. Ces bateaux ont également été conçus pour s’assembler entre eux, ce qui permettrait de créer des plateformes flottantes accueillant des marchés ou des spectacles.

Ce bateau permettrait également de gérer les contraintes de la navigation. Les chercheurs du MIT ont en effet mis en place des algorithmes de positionnement et d’orientation capables de faire avec les diverses contraintes liées à la navigation telle que la masse ajoutée au moment de l’accélération et du freinage, la force centrifuge et la résistance du bateau. Ils ont également réussi à accélérer le temps de calcul de ces algorithmes, passant de 100 millisecondes à 1 milliseconde, et ont ajouté des GPS d’une précision inférieure au centimètre.

Les cargos autonomes permettraient finalement de libérer l’espace autrefois dédié à l’équipage afin d’augmenter la capacité de stockage, ainsi que de sécuriser les ports (marins, biens, navires).

Le MIT a testé un premier prototype en environnement contrôlé, dans une piscine, mais aussi dans la Charles River à Boston et les résultats se sont avérés prometteurs, avec des taux d’erreurs de positionnement et d’orientation inférieurs à ceux enregistrés avec des algorithmes plus classiques. Néanmoins, dans une situation réelle, il est nécessaire de tenir compte des perturbations occasionnées par les autres bateaux qui circuleront et qui compliqueront le choix de trajectoire des algorithmes. L’utilisation d’algorithmes a pour but l’autonomie complète du bateau.

le remorqueur Le remorqueur Svitzer-Hermod qui a notamment été manœuvré depuis la terre par son capitaine René Malmström à Copenhague. Installé dans un des bureaux qui surplombent le port, ce dernier dispose d’un mur d’écrans vidéo lui permettant d’avoir une visibilité totale de l’environnement dans lequel se trouve son remorqueur et de pouvoir le diriger à distance sans difficultés.

Les acteurs du marché maritime autonome

Face au développement du marché maritime autonome, de nombreux pays créent leur projet et souhaitent mettre en circulation leur premier bateau autonome.

NORVÈGE : LE PREMIER BATEU CARGO AUTONOME PRENDRA LA MER EN 2018

La Norvège a été le premier pays à aménager une zone maritime pour les bateaux autonomes à Trondheim. Après les cargos électriques, la Norvège a décidé de construire et de sortir cette année aux côtés de l’industriel Kongsberg le premier cargo maritime de transport massif 100 % électrique et autonome. L’enjeu est écologique et économique : diminuer les émissions de gaz à effet de serre et le coût.

Yara birkeland La société productrice d’engrais Yara International et le groupe industriel Kongsberg se sont ainsi associés pour construire le Yara Birkeland permettant de transporter jusqu’à 100 conteneurs à une vitesse de 12 à 15 nœuds entre les trois ports du sud de la Norvège. Dans un premier temps, le bateau disposera d’un équipage avant de devenir peu à peu totalement autonome de 2019 à 2020.

Selon Bjorn Tore Orvik, le directeur du projet, le cargo devrait avoir une portée de 120 kilomètres et ainsi faire économiser près de 40 000 voyages en camion par an. Avec ce nouveau conteneur autonome alimenté par batterie, le transport de la route sera déplacé vers la mer, la sécurité des routes locales sera améliorée et les émissions de bruit, de poussière et de CO2 seront réduites (réduction d’environ 678 tonnes d’émissions de CO2 par an). Les premiers cargos de transport autonomes devraient circuler tout près des eaux norvégiennes, mais aussi américaines.

Les continents donnent des subventions à différents projets

L’Union Européenne a subventionné à hauteur de 2,9 millions d’euros le projet MUNIN (Maritime Unmanned Navigation through Intelligence in Networks) de 2012 à 2015. Quant aux Etats-Unis, ils financent le projet militaire Sea Hunter depuis 2016, bientôt abouti.

Les grands groupes internationaux investissent dans ce nouveau marché

Les grands groupes internationaux investissent eux aussi dans le marché maritime autonome. C’est notamment le cas du groupe Rolls-Royce, le célèbre constructeur de moteurs d’avions et de bateaux anglais, pour qui la mer est une voie de circulation comme une autre et se dotera très bientôt de moyens de transports autonomes, d’autant plus que l’environnement maritime qui est plus facilement accessible pour la technologie autonome que les voies terrestres complexes. Au programme de la marine de demain, on retrouve le pilotage à distance des cargos grâce à la réalité virtuelle et aux drones de reconnaissance. La réalité virtuelle associée aux capteurs, caméras HD infrarouges et radars permettra le guidage des bateaux depuis un centre de contrôle sur la terre ferme, ainsi que le visionnage des bâtiments en mer sous forme d’hologrammes. Quant aux drones, ils permettront d’anticiper les changements climatiques et les obstacles (navires etc.).

Selon Oskar Levander, vice-président innovation-marine de Rolls-Royce, le groupe lancera ses premiers cargos autonomes en 2020. Rolls-Royce et ses partenaires financent également un programme de recherche de 6,6 millions d’euros.

autonomie bateau militaire Selon le groupe anglais, l’autonomie pourrait bientôt gagner les navires militaires. Alors que le groupe industriel norvégien Kongsberg rêve de cargo autonome pour le transport de marchandises, Rolls-Royce a imaginé un bateau autonome capable de missions militaires telles que la surveillance, la détection de mine, la protection de flottes, ou encore la conduite de missions de patrouille. Ce vaisseau autonome travaillerait en parallèle de navires plus classiques, permettant ainsi de réduire certains coûts et risques pour les soldats.

Le navire disposerait d’une portée de presque 6 500 km, d’une autonomie de 100 jours, d’une vitesse maximum supérieure à 25 nœuds, d’une longueur de 60 mètres et d’une capacité de transport de 700 tonnes. Il possèderait également un système de propulsion électrique et une puissance de 1,5 MW, nécessitant bien moins de systèmes auxiliaires qu’un bateau classique. Des alternatives aux moteurs diesel seront disponibles notamment des petites turbines à gaz et des panneaux solaires photovoltaïques permettant de générer de l’énergie même lorsque le bateau est à l’arrêt. Rolls-Royce se concentre principalement sur la fiabilité absolue des systèmes d’alimentation et de propulsion, car le bateau autonome ne disposera pas d’équipage à bord pouvant pallier les éventuelles déficiences. Le groupe fait également une profonde et rigoureuse analyse du système d’autonomie afin d’éviter toute cyberattaque qui pourrait se révéler des plus problématiques.

Le plus grand centre d’essais en mer pour les bateaux autonomes en Chine

La Chine va construire le plus grand centre d’essais en mer au monde consacré aux bateaux sans pilote, avec l’objectif de lancer avant la fin de l’année son premier navire autonome. La zone maritime, d’une superficie totale de 770 km², englobe des îles qui seront équipées de sonars, de GPS, d’instruments de communication et de composants photo-électriques nécessaires au guidage des bateaux.

Grâce à ce site spécialisé, Pékin concevra une série de nouveaux systèmes autonomes civiles et militaires et pourra par la suite se positionner comme un acteur majeur dans le marché maritime autonome qui contribuera à son développement économique. Ce site symbolisera l’émergence de la Chine en tant que puissance maritime.

Afin de booster l’innovation technologique maritime, la Chine a également lancé en juin 2017 l’Alliance de développement des cargos autonomes (Unmanned Cargo Ship Development Alliance), initiée par la CSS (China Classification Society) et le consortium chinois HNA Technology Logistics Group. De nombreuses sociétés étatiques et étrangères (dont Rolls Royce et l’américain ABS) ont rejoint cette alliance, destinée à booster l’innovation maritime en Chine.

Le bateau autonome en France

Le français Bourbon, spécialisé dans les services maritimes à l’offshore pétrolier, envisage également de se lancer dans les navires autonomes, mais il travaille d’abord la digitalisation de sa flotte afin d’automatiser ses systèmes de navigation. Il a rejoint en juillet 2017 une alliance déjà composée du britannique Automated Ships et de Kongsberg (Norvège).

Stéphan Constance, le vice-président de la Fédération des industries nautiques, a annoncé que les trois de développement du bateau autonome étaient : le respect de l’environnement, la réduction de la consommation d’énergie et la technologie.

SeaBubbles En France, le SeaBubbles, conçu par Alain Thébault, devait naviguer sur la Seine et servir de taxi volant. Néanmoins, même si la maire de Paris Anne Hidlago et le président Emmanuel Macron avaient donné leur accord, le concepteur n’a finalement pas concrétisé cette démarche à cause de la vitesse limitée et du coût du port d’attache.

En effet, en raison du traffic quotidien important sur la Seine (péniches, bateaux de tourisme, batobus etc.), la vitesse maximale autorisée est de 18 km/h, alors que le SeaBubbles est fait pour aller jusqu’à 50 km/h. De plus, le stationnement du bateau coûte 1 000 € par jour. Finalement, il a été déclaré que le SeaBubbles naviguerait sur le lac Leman en Suisse dès le printemps 2018.

Même si la France n’a pas pu profiter du taxi volant SeaBubbles, elle ne s’arrête pas à cet échec et mise sur les catamarans autonomes fortement appréciés par les français. En 2017, le légendaire catamaran Energy Observer, avec lequel Sir Peter Blake remporta le trophée Jules Verne en 1994, se trouvait sur la Seine à Paris. Cet impressionnant catamaran mesure 30,5 mètres de long sur 12,80 mètres de large, pèse près de 30 tonnes et peut atteindre la vitesse maximale de 12 nœuds, soit 28 km/h (même s’il ne naviguera qu’à une moyenne peu énergétivore de 8 nœuds).

L’ancien vaisseau de course a été équipé d’énergies renouvelables avec le soutien technologique du CEA-Liten, le laboratoire des énergies renouvelables du Commissariat à l’énergie atomique, situé à Grenoble et Chambéry. Cinq ans de recherches et de travaux ont été nécessaires pour concevoir ce bateau unique au monde qui fonctionne en totale autonomie énergétique grâce à l’installation de 130m² de panneaux solaires qui se nourrissent de l’énergie solaire par le soleil au-dessus ou par la réverbération de l’eau en-dessous. Deux éoliennes à axe vertical, ainsi qu’une voile de kite ont été installées pour diminuer la dépense énergétique des moteurs.

veritable innovation Ce bateau est une véritable innovation, car c’est le premier à réunir toutes les énergies (énergie solaire, éoliennes, hydrogène) pour devenir autonome à 100 %. Au mois de Juillet 2017, il a entamé un tour du monde d’une durée de six ans dans 50 pays avec pour objectif de faire le tour de la Terre sans émettre une seule particule fine.

Ce projet, parrainé par le ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot, est le successeur des expéditions menées par le commandant Cousteau avec son fameux navire Calypso. L’objectif est de sensibiliser la population à cette technologie pouvant se développer d’ici 10 à 15 ans dans le monde entier et d’ainsi accélérer la troisième révolution industrielle, car l’énergie produite sur ce bateau peut notamment être utilisée pour des bâtiments, des quartiers et des villes.

Afin d’atteindre cet objectif, l’équipage constitué de huit personnes devra faire la promotion des technologies utilisées par ce bateau dans des lieux emblématiques, dont de nombreux sites classés au Patrimoine mondial de l’Unesco, mais aussi convaincre les industriels de financer le projet et d’investir dans les énergies renouvelables. Huit films documentaires sur la transition écologique seront également réalisés et diffusés sur Canal + et Planète +.

Les limites des moyens de transport autonomes

Même si les nouvelles technologies fascinent et reflètent le progrès, de nombreuses personnes restent sceptiques quant à la véritable mise en place des nouvelles innovations. C’est notamment le cas pour la conception et la mise en circulation de moyens de transports autonomes.

D’une part, l’autonomisation des machines a souvent été synonyme de suppression d’emplois. C’est encore une fois le cas avec la démocratisation des bateaux pilotés à distance.

D’autre part, la question de la responsabilité en cas d’incident se pose déjà aux véhicules autonomes terrestres et maritimes. Traditionnellement, que ce soit pour une voiture ou un bateau, chaque conducteur est responsable de son véhicule et doit répondre de ses actes notamment en cas de sinistre. Tout conducteur doit avoir une assurance, notamment une assurance voiture ou une assurance bateau, lui permettant de pouvoir réparer les dommages causés à autrui ou les dommages subis. Néanmoins, en cas de voiture ou bateau autonome, une problématique essentielle se pose : comment un véhicule autonome avec un conducteur passif ou sans conducteur peut-il être déclaré responsable d’un sinistre ? Pour répondre à cette question, il est important de noter qu’en France il n’est pour le moment autorisé de circuler avec un véhicule autonome que si un conducteur physique est présent à bord pour reprendre le contrôle de la voiture en cas de danger imminent. Dans le cas d’un accident impliquant un véhicule classique ou un véhicule autonome, la législation qui s’applique est similaire même si on peut noter que pour le moment la règlementation n’a pas été adaptée à des cas particuliers. Dans le cadre d’un accident impliquant un véhicule autonome, c’est donc toujours vers le conducteur que la responsabilité juridique se tourne en priorité. La responsabilité du constructeur ne sera mise en cause qu’en deuxième position si des défaillances techniques peuvent être prouvées par des expertises.

De plus, les moyens de transport autonomes ou semi-autonomes n’inspirent pas toujours confiance et sécurité. Cette idée s’est vue confortée en mars 2018 par plusieurs accidents impliquant des véhicules autonomes dont le conducteur pouvait reprendre le contrôle si besoin. C’est tout d’abord Uber qui a fait polémique. Le 19 mars 2018 en Arizona, un taxi autonome Uber a percuté et tué une piétonne de 39 ans. Par la suite, le 23 mars 2018, un véhicule autonome Tesla tue son conducteur de 38 ans en Californie après avoir percuté un séparateur d’autoroute et pris feu en suivant.

Le développement des voitures et bateaux autonomes dirigés par des algorithmes posent la question suivante : en cas de danger imminent, le véhicule va-t-il faire le « bon choix » ? Va-t-il privilégier la survie des passagers ou celle des piétons ?

Pour finir, étant donné que la mise en circulation de véhicules autonomes ou semi-autonomes a notamment pour objectif de réduire le nombre d’accidents, le nombre et le coût des sinistres serait divisé par deux d’ici 2030, ce qui ne serait pas en faveur des assureurs. Et pourtant, étant donné qu’il y aura toujours des risques d’accidents et des accidents, les automobilistes devront tout de même avoir un contrat d’assurance automobile et un contrat d’assurance responsabilité civile. En cas d’un sinistre causé par la défaillance du système d’une voiture autonome, le responsable sera le constructeur, qui aura notamment au préalable souscrit une assurance. Certains assureurs ont déjà adapté leurs offres. C’est notamment le cas d’Allianz France qui a lancé une offre spécifique prévoyant une garantie vol renforcée (notamment en cas de piratage du système informatique), une assistance personnalisée adaptée (notamment en cas de litige avec le constructeur automobile suite à des défaillances du système) et une protection juridique automobile étendue.

L’apparition de la voiture, mais aussi du bateau autonome transforme le secteur de l’assurance qui va s’adapter peu à peu au fil des années.

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